Avec l’augmentation des fraudes dans les assurances santé, les organismes complémentaires d’assurance santé (OCAM) réclament une meilleure collaboration avec l’Assurance Maladie pour optimiser leur lutte contre les pratiques frauduleuses. Le contexte s’est amélioré, notamment grâce aux avancées récentes inscrites dans le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) 2025 détail du PLFSS 2025 ici, mais de nombreux défis subsistent.
Des Fraudes en Forte Hausse
En 2024, la fraude détectée par le groupe MGEN a atteint 40 millions d’euros, soit une hausse de 61 % en seulement deux ans. Les actions en justice initiées par des mutuelles se multiplient, avec 96 plaintes déposées en 2024 contre 35 en 2023. En 2023, l’Agence de lutte contre la fraude en assurance (Alfa) a révélé un total de 83,5 millions d’euros de fraudes identifiées en santé et 96 millions en prévoyance, grâce à une combinaison entre technologies comme l’intelligence artificielle (IA) et expertise humaine rapport complet de l’Alfa sur ce lien.
Les fraudes en ligne prennent également de l’ampleur. Des réseaux organisés proposent de fausses factures et des arrêts de travail via des montages complexes souvent orchestrés depuis l’étranger. Maxence Bizien, directeur de l’Alfa, souligne que ces réseaux utilisent des fausses identités et des entreprises fictives, posant un défi logistique et juridique complexe.
Manque de Coordination Entre Acteurs
L’un des freins majeurs à une lutte efficace contre la fraude reste le cloisonnement des données entre les différents acteurs. Dans une campagne récente intitulée « Stop à la fraude » publiée en octobre 2024 par le groupe Malakoff Humanis, celui-ci dénonçait l’absence de partage d’informations sur les fraudes entre l’Assurance Maladie et les OCAM découvrez la campagne ici. Dominique Bertrand, président du Centre technique des institutions de prévoyance (CTIP), a plaidé pour une mutualisation des moyens pour lutter contre ces fraudes. Ce plaidoyer a également été porté par plusieurs fédérations comme France Assureurs et La Mutualité Française.
Avec l’adoption du PLFSS en février 2025, des dispositions concrètes, comme l’article 49, ont été inscrites pour encourager cet échange. Cet article impose à l’Assurance Maladie de transmettre aux procureurs des informations sur les fraudes touchant les OCAM. Il permet aussi un partage des informations nécessaires pour identifier les fraudeurs. Cependant, des limites subsistent, notamment sur la suspension du tiers payant en cas de suspicion de fraude, une mesure souhaitée mais rejetée par le gouvernement.
Les Audioprothèses : Focus sur une Fraude Majoritaire
Les dispositifs comme le 100 % Santé, bien que bénéfiques pour les patients, deviennent des cibles privilégiées pour le détournement. En 2023, l’Assurance Maladie a pu éviter 21 millions d’euros de fraudes en lien avec les audioprothèses grâce à des contrôles rigoureux lire le détail des contrôles ici. Début 2025, une enquête en Seine-Saint-Denis a révélé une fraude impliquant 54 organismes complémentaires et 75 caisses d’assurance maladie pour un préjudice total de 7 millions d’euros.
Les OCAM appellent à encadrer plus strictement le conventionnement des audioprothésistes afin de limiter ces abus. Laurent Borella, directeur santé de Malakoff Humanis, estime que davantage de collaboration entre les acteurs financiers et judiciaires permettrait d’accélérer les démarches et les poursuites en cas de préjudices importants.
Limites Réglementaires et Méfiance Persistante
Bien que les échanges d’informations entre l’Assurance Maladie et les OCAM soient maintenant encadrés par un cadre légal, la méfiance persiste. En novembre dernier, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) a interdit l’utilisation de certaines données en optique par les OCAM pour des contrôles préventifs, par crainte d’une perte de confidentialité. La CNIL devra également valider le décret d’application de l’article 49 du PLFSS, qui sera déterminant pour définir les modalités de ces échanges plus d’informations sur le rôle de la CNIL ici.
Selon Émeric Des Noix, avocat spécialisé, centraliser les affaires en une procédure pourrait offrir une meilleure efficacité, mais il reste des ajustements à réaliser au niveau législatif. Michel Lauzzana, député, constate que la complexité juridique limite encore le partage illimité des données de santé.
Des Enquêteurs Dédiés à la Traque
Les OCAM prennent cette lutte très au sérieux. La cellule investigation de Santéclair, acteur soutenu par des groupes comme Allianz ou MGP, mobilise une équipe d’enquêteurs formés, comprenant d’anciens professionnels de santé et même un retraité de la gendarmerie. Ces experts évaluent chaque cas pour distinguer les erreurs des véritables tentatives d’escroquerie découvrir leur mission dans Santéclair ici.
Christian Acknin, directeur général de Santéclair, révèle que, bien qu’utile, l’intelligence artificielle ne remplace pas l’analyse humaine. Selon lui, 80 % des fraudes détectées proviennent de professionnels de santé. À ce titre, une fraude découverte en Île-de-France a révélé l’utilisation de fausses factures dans des structures fictives, causant des préjudices de plusieurs milliers d’euros.
Vers une Meilleure Coordination ?
Les OCAM et l’Assurance Maladie devront surmonter plusieurs obstacles pour coordonner leurs efforts. La publication du décret d’application de l’article 49 du PLFSS, attendu prochainement, sera clé pour améliorer les échanges d’informations et renforcer les contrôles suivre l’évolution du décret ici. Les acteurs comme l’Alfa insistent sur un cadre juridique structuré pour réduire la fraude.
En conclusion, si des progrès ont été réalisés, les débats autour de la confidentialité des données et des mécanismes de contrôle montrent qu’une approche plus intégrée est nécessaire. Les organismes complémentaires appellent à une mobilisation collective pour transformer ces enjeux en actions concrètes.
1 commentaire