Les mutuelles s’apprêtent à introduire un changement important dans leur politique de remboursement, notamment en matière de lunettes et d’appareils auditifs. Ce projet, qui vise à maîtriser les dépenses de santé, suscite déjà de nombreux débats parmi les assurés comme les professionnels de l’optique.
Un nouveau rythme de remboursement pour l’optique et les audioprothèses
Le 11 avril 2025, Éric Chenut, président de la Mutualité Française, a présenté lors d’une interview aux Echos une volonté de refonte profonde du système de remboursement. Les mutuelles veulent instaurer un délai de trois ans avant tout renouvellement remboursé de lunettes, contre deux ans actuellement. Pour l’optique, cela signifie qu’un assuré devra patienter 36 mois avant de pouvoir bénéficier d’une nouvelle paire financée par sa complémentaire santé. Même si sa vue évolue plus rapidement, il devra attendre.
La mesure vise aussi les audioprothèses, avec un passage à un remboursement tous les cinq ans, contre quatre ans aujourd’hui. Cette évolution aura un impact direct sur les ménages, notamment ceux avec enfants ou personnes âgées nécessitant un suivi régulier.
Une réponse à la hausse continue des dépenses de santé
Ce durcissement intervient dans un contexte de déficit croissant de l’Assurance Maladie, estimé à 15 milliards d’euros pour 2025. Entre 2019 et 2023, les dépenses de santé ont augmenté de 20 %. Cela représente une hausse de 11,2 % à 11,5 % du PIB selon la Drees. Face à cette situation, les mutuelles cherchent à préserver leur équilibre financier. Ils souhaitent maintenir un niveau de garanties suffisant.
La Mutualité Française justifie la réforme par la nécessité de limiter une inflation des dépenses jugée insoutenable pour les complémentaires. « Nous sommes dans une pseudo-gratuité qui masque le coût réel », rappelle Éric Chenut, soulignant la volonté de responsabiliser les assurés.
Des garanties concentrées sur l’essentiel : impact sur les contrats responsables
Les mutuelles réfléchissent à redéfinir le périmètre du contrat responsable et solidaire. Celui-ci, aujourd’hui fiscalement avantageux, impose des niveaux minimums de remboursement, notamment pour les montures de lunettes. Selon le projet, le plafond de prise en charge passerait de 100 euros à 30 euros. De plus, la couverture serait recentrée sur les soins essentiels.
Les assureurs privés soutiennent aussi ce mouvement, pesant près d’un tiers du marché de la complémentaire santé. Une proposition commune de réforme devrait être soumise au gouvernement prochainement.
Pour en savoir plus sur la réglementation encadrant l’optique et la gestion des données, consultez Restrictions de données en optique.
Conséquences pour les assurés et le secteur de l’optique
La nouvelle organisation du remboursement aura des effets notables sur le quotidien de nombreux Français. Les professionnels de l’optique anticipent une baisse de la demande. À Paris, un opticien prévoit déjà une chute de 30 % de ses ventes suite à l’allongement du délai de renouvellement. Cette situation met en péril l’emploi dans le secteur. Les jeunes adultes et les personnes âgées, souvent confrontés à des évolutions rapides de la vue, devront faire face à des coûts supplémentaires ou renoncer à un suivi optimal.
Une trentenaire myope évoque, dans un témoignage à France 2, la difficulté d’attendre trois ans pour changer de lunettes. Cela est problématique alors que sa vue baisse tous les dix-huit mois. Pour ces profils, la réforme risque d’accroître le reste à charge. Ils pourraient être imposés à un compromis sur la qualité de vie.
Du côté des mutuelles, l’objectif affiché de cette réforme est double. D’une part, maîtriser les dépenses sur des postes coûteux comme l’optique. D’autre part, permettre une baisse des cotisations pouvant aller jusqu’à 25 % selon les estimations de la Mutualité Française. Pourtant, ce recentrage sur un « socle de soins essentiels » suscite des craintes. Certains y voient un recul de la solidarité et une remise en cause du modèle de la complémentaire santé à la française.
Pour suivre l’évolution des pratiques et des coûts dans l’optique, consultez également le Tag optique.
Un changement de paradigme pour le système de santé français
Cette réforme intervient alors que l’État tente de réduire le déficit de la Sécurité sociale. Si ces mesures sont confirmées, elles pourraient transformer durablement le rôle des mutuelles dans la couverture santé. En particulier pour l’optique et les équipements onéreux tels que les lunettes et les audioprothèses.
Le débat sur l’équilibre entre solidarité et logique assurantielle reste ouvert, tout comme la question de l’accès équitable aux soins pour l’ensemble des assurés. Il sera essentiel de suivre l’application concrète de ces mesures. Leur acceptation par les assurés et leur impact sur le secteur de l’optique seront à surveiller.
Pour approfondir le sujet et découvrir d’autres évolutions réglementaires, vous pouvez consulter les recommandations officielles sur le site de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees).
Résumé :
Les mutuelles françaises veulent prolonger à trois ans le délai de remboursement des lunettes. Elles souhaitent maîtriser les dépenses de santé liées à l’optique. Cette réforme est présentée comme une solution à l’inflation des coûts. Elle suscite de nombreuses interrogations sur la pérennité de la solidarité et le niveau de protection offert aux assurés. Les acteurs du secteur, tout comme les assurés, devront s’adapter à ce nouveau cadre qui redéfinit le rôle de la complémentaire santé en France.