Face aux montants colossaux de fraudes détectées, les organismes complémentaires d’assurance maladie (OCAM) réclament depuis longtemps une meilleure coopération avec l’Assurance maladie. Une avancée partielle a été introduite avec le PLFSS 2025. Cependant, des défis subsistent pour améliorer les échanges d’informations.
Une fraude croissante mais mieux documentée
Les chiffres sont alarmants :
- En 2023, l’Assurance maladie a détecté 83,5 M€ de fraude en santé.
- En 2024, le groupe MGEN a signalé 40 M€ de fraudes, soit une hausse de 61 % en deux ans.
Les fraudes se diversifient, notamment en ligne, où des réseaux organisés exploitent fausses factures et montages frauduleux. Ils le font avec de faux professionnels de santé. Selon Christian Acknin, directeur général de Santéclair :
« 80 % des fraudes proviennent de professionnels de santé, souvent détectées grâce à des incohérences relevées par l’expérience humaine, au-delà des capacités de l’intelligence artificielle. »
Certaines zones, comme l’Île-de-France, Marseille ou les zones frontalières, sont particulièrement concernées par des « fraudes documentaires » ou atypies.
Les avancées du PLFSS 2025 pour la lutte anti-fraude
Adopté en février 2025, l’article 49 du PLFSS introduit des dispositions visant à faciliter la collaboration entre l’Assurance maladie et les OCAM :
- L’Assurance maladie devra transmettre au procureur les informations nécessaires sur les préjudices subis par les OCAM.
- En cas de suspicion de fraude, des informations spécifiques sur l’auteur, les actes et prestations concernés pourront être partagées entre l’Assurance maladie et les OCAM.
Paul Esmein, directeur général de France Assureurs, salue une avancée importante :
« Cela pose un cadre légal pour un premier échange d’informations. Mais, collectivement, nous aurions pu aller plus loin. »
Cependant, des propositions comme la suspension immédiate du tiers payant en cas de suspicion de fraude ont été écartées. Cela limite l’efficacité de certaines actions.
Méfiance persistante et enjeux juridiques
Un obstacle majeur demeure : la confidentialité des données de santé. La Cnil a récemment interdit l’utilisation de certaines données dans les contrôles par les OCAM. Cela oblige les acteurs à encadrer strictement les échanges d’information. Le décret d’application à venir devrait clarifier les modalités de collaboration. Néanmoins, un « chantier juridique » est nécessaire selon les experts.
Pour Dominique Bertrand, président du Centre technique des institutions de prévoyance :
« Aujourd’hui, chacun lutte dans son coin. Ce manque de coordination mine l’efficacité des efforts collectifs. »
L’importance des enquêtes humaines dans la détection
Si l’intelligence artificielle (IA) joue un rôle clé dans le repérage des fraudes, elle ne remplace pas l’expertise humaine. Des cellules spécialisées, comme celle de Santéclair, combinent technologie avancée et investigation humaine.
Dans ce cadre, des anciens professionnels de santé, gendarmes ou opticiens analysent minutieusement les dossiers pour détecter incohérences et fraudes :
- Des soins fictifs (dentaires ou optiques).
- Des documents contrefaits circulant via des plateformes comme TikTok ou Snapchat.
- Des fraudeurs exploitant des dispositifs comme le 100% Santé, causant un préjudice estimé à 7 M€ pour des dizaines d’organismes en 2024.
Sophisticated analyses, utilisant des cartographies de zones à risques, révèlent les régions les plus touchées. Certaines des régions incluent Paris, Lyon ou la Côte d’Azur.
Perspectives : vers une action concertée
Les acteurs du secteur reconnaissent que la lutte contre la fraude nécessite une amélioration du dialogue entre les financeurs. Une transparence accrue et une coordination renforcée sont aussi nécessaires. Les avancées récentes, bien qu’insuffisantes, ouvrent la voie à une meilleure régulation.
Pour suivre les évolutions dans la lutte contre la fraude et les pratiques détectées dans l’assurance santé, explorez des ressources comme le Centre technique des institutions de prévoyance (CTip). Vous pouvez aussi visiter l’Agence de lutte contre la fraude en assurance (Alfa).
Avec les dispositions du PLFSS 2025 et des outils de détection renforcés, l’objectif d’une lutte efficace contre la fraude progresse. Toutefois, il reste essentiel d’établir un cadre opérationnel clair et collaboratif pour maximiser la prévention et la récupération des préjudices.
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